Résumé des propos du porte-parole de l’UNICEF, James Elder – à qui toute citation peut être attribuée – lors de la conférence de presse s’étant tenue aujourd’hui au Palais des Nations à Genève.
« L’UNICEF redoute la mort de milliers de nouveau-nés d’ici à la fin de l’année, en raison du mépris cruel dont font l’objet les civils et des attaques incessantes contre les services de santé et d’alimentation.
Entre octobre et décembre, 333 000 enfants naîtront au Soudan. Ces enfants et leurs mères ont besoin de soins obstétricaux de qualité. Cependant, dans un pays où des millions de personnes sont piégées dans des zones de guerre ou déplacées, et où il y a de graves pénuries de fournitures médicales, ces soins sont de moins en moins accessibles.
Les services de nutrition sont eux aussi ravagés. Chaque mois, 55 000 enfants nécessitent des soins pour traiter la forme la plus mortelle de malnutrition. Pourtant, à Khartoum, moins d’un centre de nutrition sur 50 fonctionne, et au Darfour occidental, un sur 10.
Selon les chiffres officiels, le nombre d’enfants tués dans les combats au Soudan s’élève à 435. Compte tenu de la destruction totale des services essentiels dont dépendent les enfants, l’UNICEF craint que les plus jeunes citoyens du Soudan ne connaissent une période de mortalité sans précédent. Plus le conflit se prolonge et plus les niveaux de financement restent faibles, plus l’impact sera dévastateur. Tel est le coût de l’inaction.
Je reviens tout juste du Soudan. Je ne saurais vous dire combien de personnes ont demandé de l’aide. Des enseignants, des commerçants, des architectes et surtout des mères enceintes, tous déplacés. Les familles arrivent effrayées, affamées et ont laissé derrière elles tous leurs biens.
Les femmes et les jeunes filles sont continuellement terrorisées au cours de leur fuite. De plus en plus d’informations font état d’enfants enrôlés dans des groupes armés. Et le Soudan est aujourd’hui l’un des endroits les plus dangereux pour les travailleurs humanitaires.
En dépit des risques et malgré le mépris flagrant pour la vie des civils, l’UNICEF et ses partenaires agissent en faveur des enfants dans les 18 États du Soudan, y compris dans les zones les plus dangereuses. Malgré tous les obstacles, depuis le début du conflit, l’UNICEF, en collaboration avec ses partenaires, a distribué des fournitures médicales à 5,1 millions de personnes, de l’eau potable à 2,8 millions de personnes, des tests de dépistage de la malnutrition à 2,9 millions d’enfants – dont 152 200 ont reçu un traitement vital -, de l’argent liquide à 300 000 mères et ménages pour soutenir leur résilience, et des conseils psychosociaux à plus de 282 000 enfants et personnes s’occupant d’eux, ainsi qu’un soutien en matière d’apprentissage et de protection grâce à plus de 464 espaces sûrs établis dans tout le pays.
Toutefois, nous avons besoin de fonds – à ce jour, l’appel de 838 millions de dollars lancé par l’UNICEF pour venir en aide à près de 10 millions d’enfants est financé à moins d’un quart. Un tel déficit de financement se traduira par la perte de vies humaines.
Les dépenses du secteur social sont en forte baisse. Si l’UNICEF et ses partenaires de l’ONU ne parviennent pas à mobiliser un soutien supplémentaire, les services sociaux de base risquent de s’effondrer au Soudan.
Les travailleurs de première ligne n’ont pas été payés depuis des mois. Je ne parle pas de jours, ou de semaines. Dans ce pays où l’inflation est de 200 %, les travailleurs de première ligne – infirmières, médecins, enseignants, travailleurs sociaux – n’ont pas reçu de salaire depuis des mois. Et pourtant, ils se rendent au travail. Il est même probable qu’ils travaillent en dehors de leurs heures habituelles, compte tenu des besoins engendrés par cette guerre. Comme me l’a dit une nutritionniste : « Ce sont des enfants, ils vivent dans un contexte de guerre, et tant que nous pourrons les aider, nous le ferons« . Et pourtant, leur détermination et leur dévouement ne permettent pas de réapprovisionner les stocks qui s’épuisent rapidement ou de réparer les hôpitaux détruits.
Pour ajouter à cela, l’UNICEF est très préoccupé par le fait que les écoles du Soudan n’ouvriront pas leurs portes. Le Soudan est déjà confronté à l’une des plus grandes crises d’apprentissage au monde, avec plus de sept millions d’enfants non scolarisés et 12 millions d’enfants qui attendent la réouverture des écoles. Pour les enfants, l’éducation ne se résume pas au droit d’apprendre. Les écoles peuvent protéger les enfants des dangers physiques qui les entourent, notamment des abus, de l’exploitation et du recrutement par des groupes armés. Si le conflit entraîne la fermeture des écoles, cela aura des effets dévastateurs sur le développement et le bien-être psychosocial des enfants.
Bien sûr, il faut redoubler d’efforts pour mettre fin à cette guerre. Mais alors que les attaques insensées contre les civils et les services sociaux se poursuivent, l’UNICEF a besoin d’un soutien financier et d’un accès sûr et sans entrave pour ses travailleurs de première ligne ».